En prenant notre petit déjeuner dans un café nommé « craters » (devinez pourquoi?), nous avons eu droit au chant des bonzes venant de recevoir l’aumône. Guerre et Paix !
La journée commençait bien.
Nous nous sommes présentés au lieu de rendez-vous pour constater que celle qui avait pris notre demande de transport s’était trompée de jour. Nous étions censés partir le lendemain. Heureusement, on nous a dit « no problem » et on nous a conduits à la gare routière. On a chargé nos bagages sur le toit surmonté du vélo d’un touriste apparemment japonais. No Problem !
Nous avions réservé les places 1,2, et 3, c’est-à-dire à côté du chauffeur et juste derrière, Mary-Françoise étant particulièrement sujette au mal des transports, surtout dans des véhicules qui ont oublié depuis longtemps l’usage des amortisseurs.
Nous avons alors constaté que nous étions l’objet de palabres.
On est venu nous expliquer que Mary-Françoise devait changer de place, car nous devions charger un bonze (probablement un haut gradé). Il restait pourtant une place au milieu du bus, mais un bonze ne peut pas s’assoir à côté d’une femme (c’est vrai qu’elle pourrait mordre). De plus, il voulait la place devant (on est gradé ou on ne l’est pas). Nous avons refusé de bouger, arguant que lorsqu’on a fait vœux de pauvreté, qu’on est détaché des biens de ce monde et qu’on ne paie probablement pas sa place, on ne va pas, en plus, avoir des exigences.
Ils ont fait chauffer leurs téléphones et, faute d’accord, nous sommes partis sans bonze.
Les plaisanteries de bon gout ont fusé entre nous : attention à la malédiction du bonze, le chauffeur à l’air bizarre, etc.
Après 2 heures de route environ, le chauffeur a eu l’air surpris, a fixé le tableau de bord d’un air inquiet, a laissé le bus glisser doucement sur le côté et a stoppé : un voyant rouge venait de s’allumer. Il a soulevé le capot et inspecté le moteur avec l’air de celui qui découvre son existence.
Tout le monde est descendu et en glissant un œil, j’ai constaté que la courroie de l’alternateur était sautée.
Après avoir sorti son téléphone, le chauffeur a appelé quelque chose du genre « SOS mécanique en panne ». Il a sorti un chiffon qui entourait quelques clefs et a entrepris de démonter le filtre à air qui était à l’autre bout du moteur.
Je lui ai fait comprendre, par geste, que cela ne mènerait à rien et qu’il serait préférable d’ôter la tubulure, ce qui nous donnerait accès au problème. Il s’est frappé le front en signe de désolation (mais oui, bien sûr !) et s’est exécuté.
Il est alors apparu que la courroie de l’alternateur était sautée, mais pas cassée.
Avec l’aide du supposé Japonais, nous avons réussi à la remettre en place, pendant que le chauffeur, pas gêné pour un sou, discutait au téléphone..
Un coup de démarreur et tout a fonctionné parfaitement… pendant 30s, puis la poulie inférieure est sortie de son logement et nous sommes revenus à la case départ. Sauf que la cause était maintenant évidente, c’était le guide de la poulie inférieure qui était usé et ne la maintenait plus en place (normal, plus de 200 000 km au compteur !).
Irréparable sans changer la pièce.
Entre temps, 2 minibus incomplètement chargés s’étaient arrêtés.
Ils ont essayé de répartir les passagers et les bagages en fonction de la destination, mais 2 Japonaises (des vraies : chapeaux caractéristiques et lunettes rondes), après avoir été inspecter le bus où elles devaient monter ont refusé de permuter. L’un des minibus est donc reparti avec de la place et dans le nôtre, ils ont empilé 4 passagers sur 3 sièges.
Deux heures de route plus tard, nous avons rejoint la grand-route où un minibus de secours nous attendait. Après un nouveau transfert de bagages, nous sommes repartis, avons fait bonne route et sommes arrivé à Vang Vieng avec presque 3 heures de retard.
La fin du voyage a heureusement été agrémentée par la vision superbe d’un paysage recouvert à l’infini de panaches blancs du plus bel effet.
Certains diront sans doute qu’il ne faut jamais provoquer les forces célestes ou encore qu’un forfait est toujours puni.
Incurable mécréant, je pense seulement que c’est avec ce genre de coïncidence que se forgent les croyances et les superstitions.